Je me suis toujours sentie profondément inadaptée au monde.
Enfant, je ne comprenais pas. Je regardais avec étonnement, je me souviens que je me disais souvent "ça, ça ne va pas", "cela ne devrait pas se passer comme ça". J'acceptais sans colère ni rebellion, mais avec un questionnement perpétuel, en observatrice perplexe.
En grandissant oui, la rebellion a fait surface, le sentiment d'inadéquation avec le monde encore plus, prenant la direction qui m'a sans doute sauvée, celle de la recherche créative, de l'art. Je ressentais le besoin impérieux de refaire les choses à ma façon, d'exprimer quelque chose de profond: on n'est pas obligés de suivre tous la même direction.
N'en déplaise à ceux qui pensent que quand on est artiste, on se fait plaisir, c'était douloureux sept minutes sur dix. Mais indispensable pour garder la tête hors de l'eau.
C'était ma méthode en tout cas. Elle m'a permis de tenir le coup, et pourtant le sentiment d'inadaptation était toujours là, qui poussait derrière. J'en ai ressenti une grande culpabilité, longtemps, car "on"me faisait régulièrement remarquer que je ne vivais pas "comme il faut".
C'est vrai que je faisais rarement les choses comme il est implicitement demandé de faire. Mes priorités n'ont jamais été celles qu'il est conseillé de se créer. Mes opinions étaient souvent si différentes des opinions courantes que j'ai appris à ne pas les prononcer.
Vous vous demandez où je veux en venir?
C'est que maintenant, je commence à être plus à l'aise. Je vois la face du monde et me dis avec un peu d'effroi que finalement, il vaut mieux ne pas être trop en adéquation avec tout cela. Je suis égoïstement rassurée parce qu'enfin, tout en maintenant mon propre cap, sans avoir capitulé (ça m'aurait été impossible de toute façon), je me retrouve là où il vaut mieux être, puisque par la force des choses on commence à remettre profondément en question les fondations mêmes des façons de vivre communément acceptées. Puisque toutes ces choses qui ne me convenaient pas s'écroulent de l'intérieur! Je me rends compte que oui, j'avais raison de suivre ce mouvement-là, même dans la solitude, même à conntre-courant, même si ça faisait mal. Et tout ce que j'ai vécu plus ou moins douloureusement, d'une manière instinctive, devient expérience, potentiellement à partager.
Et je dis tout ça parce que je pense que beaucoup ont vécu, vivent ce genre de vie, j'en suis sûre, de façon plus ou moins aigûe
Quand on est dedans on patine dans la semoule, on se décourage, on vit des moments difficiles, voire pire.
Alors gardez le cap, tenez bon, on est sur la bonne voie MALGRE LES APPARENCES. Le monde se recrée, NOUS construisons souterrainement autre chose, totalement en adéquation avec notre coeur et ce que nous sommes profondément; nous ne sommes pas des pions insignifiants, des petites choses impuissantes. Nous sommes des créateurs qui utilisons nos talents, et pas seulement artistiques; nos talents d'âme, d'esprit, et c'est L'AMOUR de la vie au fond de nous qui crée ce qui naît sur les cendres.
ola! c'est un peu pompeux...mais enfin c'est dit, c'est sincère, et ça fait du bien!